Ce projet de pèlerinage date de l’époque où, partant en Algérie en 1958, ma mère avait fait le vœu que, si j’en revenais vivant et sans ennuis, j’irai en remercier à Compostelle, Saint-Jacques, mon patron. Les années ont passé. Elle me rappelait de temps en temps cet engagement qu’elle avait pris pour moi, jusqu’au jour où elle se rendit elle-même à Santiago avec mon père, en voyage organisé en car.
Pourquoi en VTT ?
Personnellement, je me voyais mal, quittant ma famille et mon travail pour trois mois, et partant sur les chemins. Cependant, en 1996, lors du 40e anniversaire de ma promotion d’Ingénieurs INPG, quatre de mes camarades m’invitèrent à me joindre à eux pour un pèlerinage pédestre qu’ils avaient entamé une année auparavant et faisaient par petits bouts à raison de deux semaines par an, une au printemps, l’autre en automne.
En septembre 1996, mon père nous quitta, un an presque jour pour jour après ma mère. Il était né à Moissac… Je décidai alors, le mois suivant de la même année, d’accompagner mes camarades de Moissac à Nogaro en traversant le Gers, mon pays d’origine et de mes ancêtres.
Une arthrose naissante du genou m’empêcha de continuer. Mais pour moi, ce court parcours à cinq dans une ambiance quasi fraternelle avait laissé un souvenir impérissable et un sentiment de frustration. Malgré deux interventions chirurgicales au genou et à la hanche, miraculeuses au demeurant par leurs effets bénéfiques, force m’avait été de constater que je ne pouvais pas m’engager sur le Chemin, à pied. C’est ainsi qu’encouragé par Claude, j’optai pour le VTT. Elle m’en offrit un pour l’anniversaire de mes 81 ans.
Le Chemin
Je cherchai un compagnon : ce fut Jean Domenech, mon beau frère. Notre parcours en France s’est déroulé en trois parties : Grenoble-Figeac, Jean et moi, fin avril-début mai 2013, Figeac-Cahors en juin 2013 avec Claude, et Cahors-Roncevaux, moi seul en octobre 2013.
Nous nous retrouvâmes donc sous une pluie battante, le 27 avril, à la Porte de France, à la sortie de Grenoble pour le grand départ de ce premier périple d’une dizaine de jours, de Grenoble à Figeac en passant par le Puy.
On se connaissait bien avec Jean, mais s’engager ensemble dans une aventure de ce genre est une autre histoire. En fait, nous nous sommes parfaitement entendus malgré un parcours très éprouvant : nous avons eu 6 jours de pluie, de neige et de grand froid. Mains et pieds trempés et gelés furent notre lot quotidien. Jean, moins aguerri que moi à la montagne et à ce type d’intempérie, a été particulièrement courageux avec en prime une tendinite au genou l’ayant fait souffrir tout au long du parcours sans réussir cependant à le faire abandonner.
Visites et gîtes
Jean a également supporté mes visites répétées dans les églises ou chapelles, ainsi que des nuits en gîte avec dortoirs lui rappelant des souvenirs de service militaire qu’il ne souhaitait pas revivre.
Mais les gîtes avaient tout de même l’intérêt de nous mettre en contact avec des pèlerins, pédestres pour la plupart, dont on pouvait partager l’expérience et connaître les motivations.
Le trajet avec Claude de Figeac à Cahors fut superbe dans ces vallées magnifiques du Célé et du Lot. J’ai bien apprécié de pouvoir le faire en ménage sur un tronçon au profil relativement doux convenant bien à Claude.
Dernier tronçon en solitaire
Je fus obligé d’entreprendre seul à l’automne dernier le trajet Cahors-Roncevaux, Jean ayant eu des ennuis de santé. J’appréhendais un peu ces 10 jours en solitaire. Ce ne fut pas toujours facile. Mais un pèlerinage est un engagement personnel. L’isolement et le silence conduisent à la réflexion et également à la prière. Nous n’y sommes plus habitués dans nos vies débordantes d’activités diverses.
Ce parcours est bien différent du précédent : le Quercy blanc est complètement désert et mystérieux. J’ai pédalé toute une longue journée en n’y rencontrant pas âme qui vive, sinon un agriculteur labourant un champ isolé de tout habitat et un couple de jacquets allemands, à pied, sortant apparemment du néant.
Rouler dans le Gers, le Béarn et le pays basque est moins austère. Mais les côtes à 15 % et souvent plus, s’y succèdent à un rythme soutenu. Elles ont été bien éprouvantes avec les 26 kilos de mon équipage, vélo et sacoches, à pousser le plus souvent à pied dans les grimpettes.
L’entrée dans Saint-Jean-Pied-de-Port, à la suite de milliers de pèlerins m’ayant précédé depuis des siècles, est impressionnante. Les deux jours qui suivirent, jusqu’à Roncevaux, font partie des souvenirs les plus grandioses de ce pèlerinage, avec une arrivée très émouvante dans la magnifique église de son Monastère-Hospice.
A venir
L’automne prochain, Roncevaux-Compostelle : 800 km en Espagne. Encore un beau projet avec Jean.
Jacques Bagnérés
avec la complicité de Jean Domenech de Celles,
maris respectifs des sœurs Claude et Anne.
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.